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Personnels administratifs de l’EN : 51 757 « oubliés d’un système », mal connus des enseignants
vendredi 24 mai 2024, par
LA SECTION DE CRETEIL Partage et attend votre réaction Paris - Article n°325718 - Publié le 23/05/2024 (Sénat) Personnels administratifs de l’EN : 51 757 « oubliés d’un système », mal connus des enseignants
« C’est une administration peu ou mal connue des familles, mais aussi des enseignants. Ce sont les oubliés, les invisibles d’un système qui ne fonctionnerait pas sans eux », déclare un sénateur, selon son rapport sur les personnels administratifs de l’éducation nationale, le 23/05/2024.
Celui qui est également rapporteur spécial du budget de la MIES pour la commission des finances du Sénat a consacré son travail de contrôle budgétaire annuel à ces personnels et a présenté ses conclusions devant cette commission le 22/05.
Ce « premier travail approfondi consacré à la question depuis plus de 25 ans » indique que les personnels administratifs représentent 4,3 % des effectifs totaux de l’éducation nationale, soit 51 757 ETP en 2022. Ils représentent 17 % des personnels non enseignants (qui comprennent également les AESH et AED). Concernant le budget, ces personnels représentent, en 2023, 2,745 Md€, soit 3,3 % des dépenses totales de la MIES et 3,5 % des dépenses de personnels.
Malgré « une hausse des personnels non enseignants liée à la mise en œuvre de l’école inclusive avec notamment le triplement du nombre d’AESH », le rapport indique que les effectifs des personnels administratifs ont diminué de 21 % entre 2007 et 2022.
Dans l’éducation, on compte ainsi six administratifs pour 1 000 personnels gérés, soit une proportion cinq fois moins élevée qu’au ministère des armées et trois fois moins qu’à Bercy.
Ce travail donne lieu à dix recommandations à destination de la DGRH, la Dgesco et la direction du budget du MENJ.
Dix recommandations sur les personnels administratifs
Le sénateur explique son choix de consacrer son rapport aux personnels administratifs de l’éducation nationale :
« Lors de la présentation devant la commission des finances du budget de la MIES 2023, j’ai eu beaucoup de questions sur les problématiques administratives et j’étais dans l’incapacité d’y répondre car les données manquaient ».
Il indique que « depuis plus de 25 ans, aucun rapport parlementaire ni de la Cour des comptes ou de l’Inspection générale sur le sujet ». Il cite « une commission d’enquête de 1998-1999 dont le rapport comporte quelques maigres chapitres consacrés à l’administration ».
Un constat qui l’amène à recommander « d’inclure dans les documents budgétaires un récapitulatif des emplois et des coûts relatifs à chaque filière au sein de la catégorie des personnels administratifs, techniques et de service ».
1 - Mettre en place au sein des rectorats des référents territoriaux facilement identifiables par les personnels en établissements scolaires, constituant une porte d’entrée vers les différents services (DGRH).
2 - Moduler davantage le système de répartition des personnels administratifs entre académies afin de tenir compte plus finement des évolutions démographiques (DGRH, Dgesco).
3 - Renforcer le soutien administratif aux directeurs d’école via un appui renforcé des services départementaux de l’éducation nationale et une implication des plus forte des inspecteurs de l’éducation nationale (DGRH, Dgesco).
4 - Inclure dans les documents budgétaires un récapitulatif des emplois et des coûts relatifs à chaque filière au sein de la catégorie des personnels administratifs, techniques et de service (direction du budget et ministère de l’éducation nationale).
5 - Renforcer le cadre national applicable aux personnels administratifs contractuels, afin de valoriser et faciliter leur recrutement pour répondre aux problématiques d’attractivité (DGRH).
6 - Étendre le Pacte aux missions supplémentaires réalisées à titre exceptionnel en dehors de leur champ de compétences par des personnels administratifs présents en établissement scolaire (Dgesco).
7 - Engager une réflexion sur la rémunération des missions complémentaires effectuées par les personnels administratifs par le biais d’heures supplémentaires (Dgesco, DGRH).
8 - Préserver les moyens actuellement consacrés aux personnels administratifs afin de ne pas annuler les efforts de convergence indemnitaire avec les personnels comparables des autres administrations de l’État (direction du budget, DGRH).
9 - Abroger le cadre juridique obsolète, en particulier la circulaire de 2002 relative au temps de travail des agents, afin de clarifier l’alignement du temps de travail effectif sur le régime de droit commun de la fonction publique (DGRH).
10 - Renforcer le cadre effectif d’accès des personnels administratifs à la formation continue tout au long de leur carrière, notamment par le développement de formations d’initiative locale (DGRH).
État des lieux des personnels administratifs
Selon le rapport,
• Les deux tiers des personnels administratifs sont en poste au sein des établissements scolaires du second degré (30 % en collège et 30 % dans les lycées),
• 20 % dans les rectorats,
• 13 % dans les services départementaux et les circonscriptions,
• 3 % dans l’administration centrale.
Le sénateur précise qu’il « n’existe pas de personnel administratif dans les écoles ».
« Toutes les tâches sont intégralement accomplies par les directeurs d’école, qui bénéficient de très peu de décharges notamment dans les petits établissements. »
Le rapporteur spécial note ainsi que la répartition géographique des personnels administratifs dépend en grande partie de l’implantation des établissements du second degré sur le territoire. « Il faut toutefois noter certaines variations locales : les académies de Créteil, Nantes ou encore de la Guyane ont des taux d’encadrement des élèves par les personnels administratifs de 3 pour 1 000, contre 5 pour 1 000 pour les académies de Corse, de Limoges ou encore de Paris.
* Les académies les moins bien dotées en proportion de personnels administratifs par élèves sont celles de Mayotte (2,8 pour 1 000), suivie de Rennes (2,9 pour 1 000). »
Des personnels moins qualifiés et moins bien rémunérés que dans les autres ministères
« Les personnels administratifs sont, de plus, globalement moins qualifiés que dans les autres administrations.
• Les fonctionnaires de catégorie C représentent 39 % des effectifs totaux de personnels administratifs, contre 18 % pour le reste de la fonction publique d’État,
• et les fonctionnaires de catégorie B, 30 % des effectifs contre seulement 20 % pour l’ensemble de la fonction publique d’État. »
Selon Olivier Pacaud, « la rémunération des personnels administratifs de l’éducation nationale est largement inférieure à celle ayant cours dans les autres administrations. En moyenne, les personnels administratifs de l’éducation nationale sont payés 360 € brut de moins par mois que les agents d’autres administrations. La différence atteint 410 € brut par mois pour les personnels de catégorie B ».
« Le MENJ a reconnu être en retard par rapport à la moyenne des administrations sur la rémunération. Le secrétaire général a lui-même indiqué qu’un agent de catégorie B du ministère de l’intérieur gagne plus qu’un agent de catégorie A du MENJ », déclare le sénateur.
Néanmoins, le rapport note qu’entre 2021 et 2023, « les revalorisations indiciaire et indemnitaire des agents de la filière administrative conduisent à un gain moyen par ETP de près de 3 620 € bruts annuels. Entre 2 020 et janvier 2024, la rémunération moyenne mensuelle brute des personnels administratifs a augmenté de 333 €.
Une part de cette revalorisation recouvre certes des mesures générales accordées à l’ensemble de la fonction publique, en particulier les deux revalorisations successives du point d’indice. Environ les deux tiers de la hausse sont toutefois liés à des augmentations spécifiques pour ces personnels. Cet effort financier doit être salué et constitue une reconnaissance de l’engagement des personnels administratifs ».
Une administration en perte d’attractivité
« La dynamique de rattrapage salarial entre l’éducation nationale et les autres administrations est loin d’être aboutie et ne peut que s’avérer problématique s’agissant de l’attractivité du ministère », écrit Olivier Pacaud qui indique que les inscriptions aux concours administratifs du MENJ ont diminué de 35 % entre 2018 et 2023.
« La situation n’est cependant pas considérée comme critique par le ministère, dans la mesure où le nombre d’inscriptions par poste (12,2 à la session 2023) et celui de présents par poste (6,8) restent élevés, permettant une sélectivité satisfaisante et limitant le nombre de postes non pourvus. Il convient cependant d’être attentifs à ce que ce ratio ne se dégrade pas davantage au cours des prochaines années. »
Un renouvellement constant des équipes administratives
« Depuis la rentrée 2020, les moyens budgétaires inscrits en loi de finances ne prévoient aucune création d’emplois pour les personnels administratifs. Cette stabilité fait suite à des années de réduction.
La dernière hausse des plafonds d’emplois des personnels administratifs remonte à 2017 et a été suivie de deux baisses successives en 2018 et 2019, puis une stabilité jusqu’en 2024.
En conséquence, les créations d’emplois ultérieures se sont essentiellement faites par redéploiement entre académies et par utilisation de plafonds d’emplois sous-consommés du fait du non-recrutement d’enseignants. »
« On constate un renouvellement constant et extrêmement important des équipes administratives, facilité par l’accroissement du recours aux contractuels. Le nombre de personnels contractuels augmente rapidement (+ 38 % entre 2013 et 2021) et atteint aujourd’hui 32 % des personnels administratifs (en personnes physiques).
En 2021, 44 % des personnels administratifs contractuels avaient moins d’un an d’ancienneté et 78 % d’entre eux avaient moins de 5 ans d’ancienneté. Près de la moitié des dépenses à destination des personnels administratifs concernent les rémunérations d’agents de catégorie A, plus élevées, contre respectivement 28 % et 23 % pour les catégories B et C. »
Des missions et des outils toujours plus complexes
Le sénateur pointe une complexification des missions de ces personnels qui ont été « renouvelées sous l’effet de diverses réformes ou réformettes ».
Il cite en exemple la mise en place de la gratification des PFMP dans le cadre de la réforme de la voie professionnelle : « Depuis la rentrée 2023, à la suite du décret du 11/08/2023, ces personnels participent à la mise en œuvre du versement d’une allocation en faveur des lycéens de la voie professionnelle ».
Le rapport évoque également le pacte enseignant, également mis en place à la rentrée 2023, et note que « rien n’a été prévu dans les logiciels informatiques pour permettre le paiement des briques du pacte dans le premier degré ».
« De même, les modes de recrutement des enseignants ont évolué, notamment du fait de recrutement massif d’enseignants contractuels, impliquant une professionnalisation accrue et rapide des services des rectorats dédiés aux recrutements. La population des AESH a été multipliée par trois entre 2015 et 2022, impliquant une augmentation des tâches liées à la gestion de ces personnels. »
Outre la complexification des missions, le sénateur s’intéresse aux outils des personnels administratifs et rapporte que « l’évolution des systèmes informatiques a impliqué le déploiement d’applications informatiques nouvelles, dont la prise en main a été difficile pour les personnels administratifs, occasionnant des surcroîts de travail ».
Il cite les logiciels RenoiRH et Op@le qui « ont généré beaucoup de problèmes d’assimilation de la part des personnels concernés ».
« Ils n’ont pas encore tous bénéficié des formations prévues. Chaque territoire a été contraint de s’adapter et il n’existe pas de chiffres globaux. »